La cause en est une modification du circuit neuronal de la douleur : celle-ci est alors « mémorisée » dans les neurones, et cette mémoire peut parfois perdurer plusieurs mois. Les chercheurs tentent d’effacer cette trace mnésique pour soulager les patients.
Comment la douleur se grave dans les neurones
La mémoire est la rétention d’une information susceptible de modifier le comportement d’un organisme, par le biais d’une « potentialisation » de l’activité électrique des neurones : c’est ainsi que nous conservons des souvenirs. Mais certains neurones des nerfs sensoriels, qui réagissent normalement à une stimulation douloureuse, amplifient parfois de façon aberrante les messages de douleur jusqu‘à en laisser subsister une trace plus ou moins permanente : une douleur aiguë peut ainsi se transformer en douleur chronique, même longtemps après la disparition de la cause initiale. Tout le réseau impliqué dans la perception de la douleur par l’organisme, de la moelle épinière jusqu’au cortex cingulaire antérieur et l’amygdale fait dans ce cas office d’amplificateur en cascade de la sensation douloureuse.
Le cas des douleurs post-chirurgicales
Pour limiter l’excitation des neurones lors d’une intervention, les anesthésistes injectent souvent d’importantes quantités de composés morphiniques.Très efficaces sur le moment, ces composés peuvent avoir, à long terme, un effet inverse en provoquant une surréaction à une douleur ultérieure. De plus en plus conscients de ce problème, les praticiens complètent aujourd’hui l’anesthésie générale par des médicaments actifs contre la sensibilisation, comme la kétamine, qui permettent de limiter les doses de morphine. D’autre part, le chirurgien lui-même peut n’avoir d’autre solution que de porter atteinte aux nerfs sensoriels eux-mêmes lors de l’intervention. La douleur résultante, dite « neuropathique », peut devenir chronique : un traitement médical spécifique peut alors être indiqué.
Des syndromes encore mal connus
Certains syndromes restent cependant mal expliqués, tels celui du « membre fantôme » ressenti après une amputation. De même, les enfants nés prématurément, qui ont subi de nombreuses douleurs aiguës lorsqu’ils étaient en couveuse, peuvent présenter à l’âge adulte des syndromes douloureux mal diagnostiqués : cette situation doit être mieux prise en compte par les cliniciens qui s’occupent de jeunes enfants.
Parmi d’autres solutions : la stimulation transcrânienne
Certaines machines délivrent des champs magnétiques ou des courants électriques qui traversent le crâne et activent des circuits nerveux du cortex cérébral. Près de cinquante pour cent des patients réagissent favorablement à ces traitements et voient leur douleur diminuer progressivement. Deux à cinq séances par semaine pendant une à cinq semaines, sont généralement nécessaires ; elles seront suivies de séances ultérieures d’entretien, plus espacées.
Et les médicaments ?
Le patient et la nature de la douleur sont à prendre en compte. A côté des classiques paracétamol et anti-inflammatoires non-stéroïdiens, les opioïdes sont souvent prescrits pour les douleurs violentes et persistantes. Mais leurs effets secondaires indésirables sont tels que la prescription ne peut être permanente. Quant aux anti-épileptiques, ils peuvent soulager certaines douleurs neuropathiques. Près d’un tiers des patients réagissent bien à ces médicaments, dont l’effet, hélas, cesse dès qu’ils ne sont plus présents dans l’organisme…
Quand une douleur chronique résiste à tout traitement il reste une solution : les thérapies « psychologiques » comme la sophrologie, la méditation, l’hypnose qui apprennent au patient à vivre différemment avec la douleur pour ne plus la subir.
C’est parce que la douleur n’est pas qu’une sensation : c’est aussi une émotion qui s’accompagne de stress, d’anxiété et parfois de dépression. Avec ce genre de thérapie, le patient apprend à accepter sa douleur et à reprendre ses activités habituelles.
Dossier : http://www.cerveauetpsycho.fr/ewb_pages/a/article-dossier-les-douleurs-chroniques-38007.php